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Wild : Silence et rédemption

Écrit par: AI - janv.• 17•15

Dans Wild, Jean-Marc Vallée propose une adaptation bouleversante du roman autobiographique de Cheryl Strayed. L’histoire qui nous est montrée est celle d’une jeune femme qui, après avoir touché le fond, décide d’entreprendre un parcours de randonnée où elle souhaite se retrouver et surtout retrouver la femme que sa mère espérait qu’elle serait. Le film se divise en deux trames narratives : celle du parcours de randonnée de Cheryl sur le PCT (Pacific Crest Trail) et celle de ses souvenirs.

Wild (le livre)

Au début du film, nous sommes pris in media res dans l’action avant qu’un retour en arrière soit effectué.  Nous sommes étrangers à l’histoire et ne sommes pas particulièrement intrigués par les événements. Pourrions-nous même parler d’ennui ? Puis, l’émotion commence à poindre et troubler. Petit à petit le spectateur comprend la vie de la jeune femme et ce qui l’a amené au parcours, bien réel, de la randonnée et celui, plus symbolique, de sa rédemption. Plusieurs éléments participent à créer cet ensemble et l’atmosphère poignante du film.

Tout d’abord, le montage est original et bien réalisé. Il y a des sauts rapides d’images, presque des coupures ; de longues scènes silencieuses mettent en valeur Cheryl, tandis que d’autres nous montrent les décors magnifiques et immenses dans lesquels elle évolue. Ces paysages silencieux à perte de vue donnent l’impression au spectateur d’être présent aux côtés de Cheryl, de l’accompagner dans sa randonnée. Le film est calme, long, presque apathique, mais l’émotion qui ressort de l’image est saisissante.

L’atmosphère particulière qui se crée et se dégage du film est également due à l’utilisation de la musique. Des titres variés et parfois inattendus offrent un ensemble diversifié. Le lien entre l’image et le son est donc très intéressant étant donné que la musique est aussi importante dans la création de l’ambiance que dans le rôle qu’elle joue dans l’histoire. En effet, à plusieurs reprises, le réalisateur a recouru à de la musique qui fait réellement partie de l’action et a permis la naissance des scènes parmi les plus poignantes du film. La musique occupe la solitude de la jeune femme, lui permettant d’accomplir des avancées sur son chemin symbolique, elle est un souvenir quand Cheryl repense à sa mère qui chantait et dansait. La musique ne peut donc pas être reléguée au statut de simple accompagnatrice. Cependant, le silence est très présent également et permet de ressentir la solitude, mais aussi la quiétude ambiantes.

Si l’histoire est émouvante, le personnage de Cheryl est touchant aussi. Cette force et faiblesse simultanées sont transmises de manière très juste par le réalisateur, mais aussi par le jeu de Reese Wihterspoon qui crie, jure, pleure, rit, veut abandonner, désespère, espère. Au fil de sa solitude, mais aussi des rencontres sur son chemin – certaines plus importantes que d’autres –, des discussions de Cheryl avec elle-même, des mots qu’elle laisse sur son passage et dans son journal, elle va apprendre beaucoup, accepter et se reconstruire. Le film montre ainsi la vie, malgré la mort, l’humanité, malgré la solitude, l’espoir, malgré les doutes et les regrets. Cependant, des changements ont bien évidemment été apportés au film par-rapport au roman et parfois l’image paraît surfaite, mais dans l’ensemble le rendu est prenant. Le film n’est cependant pas particulièrement rythmé et, du fait qu’il comporte peu de rebondissements, peut paraître long, même si l’on a envie de suivre l’aventure de Cheryl Strayed jusqu’au bout.

Avec des airs d’Into the Wild version féminine sur le plan de l’histoire, ce film est tout de même original et intéressant. Il y a des moments drôles, des scènes qui peuvent choquer les personnes sensibles, et encore des moments particulièrement bouleversants. Tout au long du film le spectateur vacille entre rires et larmes de manière rapide, mais naturelle. Comme dans la réalité… Nous nous retrouvons à partager l’intimité de cette jeune femme et l’on ressort comme pris dans une bulle de silence et d’éloignement des bruits ainsi que de la foule urbaine.

Jean-Marc Vallée. Wild. Fox-Warner. 2014.

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